Association "LIV AN NOZ"             ( Couleurs de la Nuit )


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L'Association LIV AN NOZ a pour but l'animation, la création et la diffusion d'activités culturelles à partir d'un lieu existant:  

le Café-Concert TOUCOULEUR

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    Patrick CADEILLAN   

 

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Patrick CADEILLAN:

"Coup de Soufflet sur la Gascogne"

Patrick CADEILLAN: Accordéon Diatonique

Aujourd’hui « l’accordéon le petit » a reconquis les campagnes. Chaque région possède maintenant au moins une personnalité marquante. Dans le petit monde du diatonique gascon, Cadeillan reste un incontournable.

L’initiation musicale de Patrick Cadeillan serait presque banale, si l’on oubliait le caractère bien trempé du bonhomme. Tout commence dans la cours du collège, où Patrick sort la flûte à bec qu’il devra utiliser en cours de musique. Pour passer le temps, il cherche des mélodies venues d’Amérique du Sud, d’une certaine musique traditionnelle ( hé oui, déjà) à la mode à cette époque, vers 1970. Vient ensuite le dulcimer des Appalaches. Le périple musical commence. Après l’Amérique du Sud, celle du Nord. Puis enfin, le retour au pays, à la tradition gasconne. Perlinpinpin Folc écume l’Agenais et le Sud-Ouest, avec Marc Pérrone au diatonique ( connu aujourd’hui du grand public surtout pour ses musiques de film) qui sera le déclic et demeurera le modèle de Patrick – le seul qu’il veut bien se reconnaître.

Ernest Lurde et Léa Saint Pé, cadence et variance

Deux ans après ses premiers pas à l’accordéon, Cadeillan remplace Marc Pérrone dans la formation Perlinpinpin Folc, au sein de laquelle il jouera pendant seize ans. Les tournées avec le groupe en Europe, Inde et Afrique du Nord élargissent son horizon musical. Mais les concerts et les bals donnés dans toute la Gascogne lui feront rencontrer deux musiciens traditionnels qui marqueront son jeu : Ernest Lurde ( de Castelnau Magnoac) et surtout Léa Saint Pé ( de Polastron dans le Gers). Le premier a un jeu très répétitif et ne s’écarte que très peu de la mélodie. Mais Patrick sera impressionné par la « cadence d’enfer » du musicien. Ce quelque chose que l’on pourrait définir comme le swing Gascon et qui demande une grande finesse dans le coup de soufflet : un tiré en forté avec une légère accélération, suivi de poussé-tirés presque retenus, par exemple dans le rondeau. Pour acquérir cette technique, il jouera en compagnie d’Ernest Lurde à l’occasion de veillées gasconnes et de bals.

Il passera aussi du temps avec Léa Saint Pé, plus qu’avec Lurde avoue-t-il, car le personnage a comme lui du caractère. Le jeu de Léa est en apparence brouillon. Car si elle a aussi la fameuse cadence dans le maniement du soufflet, sa technique de jeu se caractérise par une main droite polissonne qui s’écarte des sentiers battus. Léa agrémente les thèmes qu’elle joue d’ornements réalisés par des coups de doigts, en faisant varier les contours mélodiques. Et elle développe un jeu harmonique à cette même main droite : pourquoi ne faire qu’une note à la fois lorsqu’on peut en faire plusieurs ? D’où une main droite foisonnante, à la fois mélodique et polyphonique. Patrick retiendra la leçon, forgeant ainsi son style, en retenant de ces deux références de la tradition gasconne ce qui lui semble le meilleur : la cadence de l’un, l’ornementation et le jeu main droite en accords de l’autre. Bien sûr, on ne saurait parler de purs emprunts de technique de jeu, mais plutôt d’inspiration . Patrick n’a pas tellement suivi à la lettre ce qu’il entendait et voyait, mais a voulu conserver l’esprit, qui tient en deux mots : cadence et variance.

La « gasconitude », entre tradition et modernité

Ainsi s’est il forgé un style de jeu personnel, qui tient autant de la tradition des anciens musiciens routiniers que d’une esthétique contemporaine. Cette dernière s’exprime dans la précision du jeu - qu’il doit sans doute à Marc Perrone -, le travail du timbre, la recherche mélodique et harmonique. Patrick se nourrit des divers styles traditionnels qui ont intégré le diatonique, comme la musique irlandaise ou, plus près de lui, celle du Pays basque qu’il affectionne particulièrement. Il faut dire qu’elle correspond bien à ses options techniques – jeu harmonique, swing, variation, mais aussi vélocité digitale -, ce qui n’est pas le cas dans la tradition gasconne, plutôt tournée vers l’efficacité. L’écoute et le travail de trikitixa ( cette formation basque composée d’un diatonique et d’un tambour de basque) lui permettent d’agrandir son répertoire en y ajoutant fandangos et arin-arins, tout en développant une discrète virtuosité qui refuse la gratuité.

Le style de Patrick Cadeillan s’est ainsi construit pas à pas, entre tradition gasconne et modernité, disons « universelle ». Comme d’autres, il avait bien compris que de la copie pure et simple de la tradition aurait résulté une musique figée, donc sans grand intérêt, et que l’ignorance du passé n’aurait produit qu’une mode passagère. C’est dans ce que l’on pourrait appeler la « gasconitude » que son style prends sa source, sans aucune connotation politique ou revendicative. Pour Patrick, le terme « gascon » ne saurait désigner autre chose que son rapport intime et personnel avec le lieu où il vit : les coteaux et vallons du Lot et Garonne, un paysage agricole calme pour l’œil , le corps et l’esprit. Il ne faut pas oublier la cuisine locale, car le bougre est aussi un gourmet doublé d’un amphitryon . Et puis surtout, l’impression qu’ici le temps semble aller moins vite.

Presque comme une expression de douleur

La règle de vie de l’accordéoniste se résume en un mot qu’il se délecte à prononcer fréquemment : farniente . Une répétition chez Patrick, c’est autant de temps passé à ne rien faire. Juste à parler de choses sans grande importance en sirotant une bière, à faire la sieste après un bon repas arrosé d’un vin du pays et éventuellement à jouer. Surtout ne jamais jouer sous la contrainte. La musique , comme le reste, doit rester un plaisir (celui du son pour le son, de triturer une mélodie pour la faire sienne, de faire danser). Il ne faudrait pas croire que Patrick soit fainéant. Il faut le voir animer un bal seul plusieurs heures d’affilée, penché sur le diato, les yeux fermés dans un visage contracté, ou au contraire comme sorti de leurs orbites et quasiment posés sur l’accordéon , pour surveiller l’ensemble des danseurs. C’est presque comme une expression de douleur que l’on peut alors lire sur sa physionomie. Mais cette interprétation serait erronée : tout simplement, il se donne pour que, comme l’on dit maintenant, « ça le fasse ».

( M. L – Accordéon magazine)